Camille, quant à elle, mène l’enquête en sillonnant la ville. Elle marche seule, d’un pas fluide et doux, pour que son corps et son esprit se répondent dans un seul mouvement, propice à l’éveil de la sensibilité, d’un rapport plus intime au monde, plus authentique. Optant pour la casquette de traductrice, elle témoigne. Ses dessins deviennent alors le sentiment de communion avec l’environnement dans lequel elle évolue. Animée par le désir profond de capter l’invisible, elle fusionne son corps humain à celui non-humain. Tandis que la ville, normée, est construite pour qu’on ne s’y égare pas, offre des repères, recèle de lieux nommés. Nombreux subterfuges mécaniques sont proposés aux passants pour accroître en vitesse et gagner du temps. Mais, la marche permet de voir au-delà de cette organisation de signifiants. Ainsi, lui échappe l’urbanité de ces espaces qu’elle traverse pour glisser vers un végétal englué de pétrole. Camille marche dans la ville, comme elle le ferait en forêt. C’est dans cette perspective, que ses dessins muent la vision d’un végétal hybride, aux protubérances organiques, inhérent au vivant. Dépendants du moment présent, ses pièces s’activent au grès du vent, tandis que les heures filantes d’une journée révèlent un minéral évolutif.
Tiraillé par les hétérotopies, Athanasios Kanakis étudie les fragments géologiques. Ces sols sont sans cesse recouverts par différentes strates de temporalités. Différentes époques se chevauchent chacune avec une histoire à révéler ou non, uni par un seul et même processus. Il s’agit en quelque sorte d’un bricolage d’objets trouvés, composés de matériaux divers : la tôle ondulée, le plastique, l’argile, le métal et la pierre. Ce sont ces objets et ces matériaux qu’Athanasios expérimente. Enracinée dans le sol, artificielle, non-vivante, la ruine est la manifestation d’un monde artificiel, obsolète, en rupture totale avec son environnement. À travers des collages et des installations, Athanasios s’empare de ces fragments pour réécrire une histoire intemporelle et fictive. Il s’inspire du lieu pour produire un environnement architectural fragile et contemplatif, un lieu à la fois nouveau et immersif. Il souligne ainsi les fissures et les ruptures de l’espace quotidien, comme une porte ouverte pour donner naissance à une nouvelle construction.